Jolies ténèbres

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28 novembre 2009 par Lunch

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Lunch

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C’est comme un conte un peu malsain …
Une petite fille reçoit son amoureux Hector dans son salon. Confortablement installés dans un sofa à consommer un bon chocolat chaud avec du cake, en compagnie du petit « frère » qui joue le serviteur. Lorsque tout à coup, le décors se met à changer radicalement, il fond et dégouline, d’énormes goûtes rouges et gluantes tombent et obstruent la sortie. Mais tout le « petit monde » se retrouve quand même dehors sain et sauf. L’endroit d’où ils sortent par dizaines se dévoile peu à peu … le corps d’une fillette, étendu sur l’herbe rosée, immobile.

Par où commencer ?
Tout d’abord l’accroche visuelle : lorsque j’ai croisé ce livre en librairie, j’ai de suite été saisi par la beauté de la couverture, une illustration magnifique montrant le visage « endormi » de la fillette. Quelle beauté !
Et il suffit d’ouvrir la bande-dessinée pour se conforter dans cette idée, le dessin est vraiment magnifique, alternant la simplicité d’un trait qu’on retrouverait avec grande joie pour accompagner les contes pour enfants, et la dure réalité, sombre et sinistre, du cadavre !

Car c’est là l’histoire : nous sommes plongés dans un conte qui n’en est pas vraiment un. La vue du corps de la fillette est omniprésent, du début à la fin du tome, qui part tout en douceur et qui se dégrade peu à peu :
Au départ, les petits êtres font face à leur nouvelle vie hors du corps, ils s’organisent pour tenir le coup, ils font front au monde extérieur pas forcément rassurant, mais avec une énergie débordante et le sourire. Puis au rythme du corps qui se décompose, les protagonistes deviennent de plus en plus obscurs, mauvais, malsains.

Cet album est le fruit d’une idée originale de Marie Pommepuy, qu’elle a développé avec Fabien Vehlmann. Et c’est encore elle qui est au dessin, car Kerascoët est en fait un binôme qu’elle partage avec Sébastien Cosset.

J’ai vraiment adoré ce « one-shot ». C’est beau, mais faites attention, car ce n’est clairement pas un livre à mettre dans toutes les mains !
Reste à savoir ce qui les auteurs ont voulu en faire : une représentation poétique de la mort ? une introspection post-mortem de la fillette cherchant son assassin, se raccrochant à la dernière odeur qu’elle a senti ?
Je crois qu’il n’est pas nécessaire d’en faire une analyse psychologique, Jolies ténèbres c’est une excellente BD, à lire (et relire) sans modération.

Badelel

Badelel

Addendum du 29/06/2011

Jolies Ténèbres est un album tout en contrastes. La couverture, le style de dessin, les premières pages nous font miroiter un univers tout en innocence. Ce serait bien mal connaître Fabien Vehlmann qui nous a concocté, comme à son habitude, quelques surprises.
Jolies Ténèbres aborde en fait la mort et la cruauté sans aucun fard, et avec d’autant plus de brutalité que l’héroïne, Aurore, se cache derrière tout un tas de bonnes intentions.
Personnages issus de l’imagination et des rêves d’une petite fille morte, les protagonistes se caractérisent par le « sadisme latent » de l’enfance (dixit Freud), les barrières du monde adulte en moins.
Les personnages aux traits ronds et les couleurs acidulées de Kerascoët tranchent également avec les images de cadavre et les situations dramatiques qu’il représente.

Bref, voici une BD qui bouscule, qui se démarque par l’originalité de sa démarche et par le ton adopté, et qui séduit ceux qui aiment être surpris. A ne pas mettre entre toutes les mains pour autant : âmes sensibles s’abstenir.

Jolies ténèbres (One shot)
Scénario : Fabien Vehlmann & Marie Pommepuy
Dessin : Kerascoët
Édition : Dupuis 2009
La présentation de l’album sur le site de l’éditeur.

7 réflexions sur “Jolies ténèbres

  1. Lunch dit :

    Par Yaneck le 03/07/2011 :

    Complètement d’accord avec vous. Et ravi de voir, Angélique, que tu as apprécié, car c’est souvent un album qui est rejeté par le public féminin.

    Par Lunch le 03/07/2011 :

    Ma chronique date un peu, mais ça y est, elle a décidé de faire la sienne aussi.
    Effectivement, le public féminin a tendance – en général – à trouver le thème traité trop crument.
    Enfin moi j’adore vraiment cet album ^^

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  2. […] dessine, et Hubert colorise. Le scénario s’assimile à un conte de fée (un vrai, pas comme Jolies ténèbres). Il y a tous les ingrédients pour : l’héroïne est une pauvre hère sans le sou mais […]

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  3. […] le nouvel album de ce très grand scénariste qu’est Fabien Vehlmann. Moi qui avait adoré Jolies Ténèbres, dessiné par Kerascoët, j’ai voulu prolonger la découverte de l’auteur avec un autre […]

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  4. […] Vehlmann est plutôt coutumier de ce thème, récurrent chez lui, qu’est la mort. Dans Jolies Ténèbres, il l’aborde de plein fouet, comme une claque bien cinglante qu’on prend en pleine […]

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  5. […] de détails. Un décorum où le miniature côtoie le divin et qui n’est pas sans rappeler Jolies Ténèbres (dans la comparaison de tailles mais aussi dans « l’appétence »). Voir évoluer un être […]

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  6. […] c’est mérité car l’album est très bon, même si selon moi, il ne vaut pas Blast ou Jolies Ténèbres. Une histoire plutôt triste et dure, un conte qui commence très mal. Pourtant, quelle poésie ! […]

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  7. […] cette sortie ! Un nouvel album du duo Vehlmann/Kerascoët, qui m’avait tant enchanté sur Jolies Ténèbres, je pouvais pas louper ça ! J’ai sauté sur l’occasion dès mon premier passage en […]

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