Buffalo Runner

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25 janvier 2015 par Lunch

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Lunch

Lunch

Quelque part au milieu des regs, entre le Texas et le Mexique, une carriole file à vive allure, soulevant derrière elle une trainée de poussière aride. Fuyant la Nouvelle-Orléans pour l’eldorado californien, la famille Ducharmes – un père et ses deux enfants – défie les dangers de la route…
En chemin, alors qu’ils pensent avoir repéré une halte où se désaltérer, c’est la mort chaude et sanglante qui les accueille. Seule la fille, Mary, aura la vie sauve grâce à l’intervention d’un cavalier solitaire du nom d’Edmund Fisher.
Retranchés dans le refuge, la jeune fille et son sauveur se préparent au lever du jour qui promet d’être décisif face à des bandits nombreux et revanchards…

Outre ce rapide synopsis de mise en bouche, on pourrait aussi résumer Buffalo Runner à une unique punchline : un vétéran de la gâchette se retrouve isolé dans une cabane de fortune et s’apprête à livrer le combat de sa vie contre des hors-la-loi sans scrupules.
Et il fait bon de souligner que la bande dessinée franco-belge n’est pas toujours la plus inspirée en matière de punchlines. L’idée de Tiburce Oger est claire et se place d’emblée sous le signe de l’action. On sait ce qui nous attend : une attaque au petit matin, des coups de pistolet et pas mal de victimes.

L’histoire de l’Ouest

La nuit s’annonce longue dans la maisonnette, mais pas d’affolement pour autant… Ed Fisher le sait : l’attaque aura lieu au petit matin, quand la fatigue sera trop pesante.
Il prépare alors son combat, fabrique ses propres munitions… ce faisant, le vieux cowboy raconte son histoire. Une vie bien remplie faite de multiples rencontres et d’expériences diverses, qui l’a vu exercer en tant que chasseur de Buffalos (autrement dit de bisons), soldat durant la guerre de sécession, fermier, homme de main et même vacher sur le tard. Une vie de revers et d’amertume…

« Je ne supportais pas l’arrogance des militaires. Ils méprisaient les indiens. Moi, je les haïssais, mais je reconnaissais leur existence d’êtres humains. »

Cette histoire dans l’histoire, nous dresse le portrait d’une époque, celle de la conquête de l’ouest avec tout ce qu’elle a de sauvage, s’étalant plus précisément sur la deuxième moitié du 19ème siècle.
Bien que son récit soit intéressant d’un point de vue historique – on croise notamment Théodore Roosevelt – je ne me suis jamais vraiment senti conquis par ses propos. L’ambiance aurait peut-être gagné à être plus tendue, entrecoupant ces paroles pleines de nostalgie par des scènes de guet ou d’alertes, mais la force tranquille du personnage rassure.

« Ça n’a pas l’air trop grave, ma vieille. Arrête de faire ta douillette, la balle n’a touché que du gras. Fallait planquer tes fesses, tu voyais bien qu’il tirait mal… »

Pour autant, la fin est surprenante à souhait et laisse vraiment songeur (dire qu’on ne s’y attend pas est un euphémisme). Elle apporte de la profondeur au personnage et un vif regain d’intérêt, nécessitant quasiment à elle-seule une deuxième lecture.
Pourtant, à bien y regarder, l’auteur n’a distillé aucune piste (ou du moins m’ont elles toutes échappées) qui permette de se dire « ah mais oui, bien sûr ! » et qui apporte une dimension supplémentaire à la lecture.

Western à l’ancienne

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Buffalo Runner – Tiburce Oger © Rue de Sèvres 2015

La scène de début, chez le photographe, n’est pas franchement utile mais elle ne gêne en rien la lecture. Les sauts dans les temporalités, ces alternances de flashbacks, m’ont un peu plus dérangés, le temps de me faire à la narration. Ce qui reste après ça est un bon western comme on n’en fait plus tant que ça aujourd’hui et qui nous rappelle à tous ces films qu’on a tant aimés et qu’on visionne encore avec beaucoup de plaisir de temps en temps.

Pour accompagner le récit, les dessins d’Oger affichent la crasse nauséabonde des ruines fumantes les lendemains de massacres et savent aussi rendre grâce à la nature par de belles illustrations aux cadrages parfaits. Les traits des personnages sont saillants et expressifs : peine, amertume ou colère se lisent sur ces visages marqués par la rudesse du temps.

Auteur complet, Tiburce Oger revient donc à ses premières amours 15 ans après La piste des ombres. J’ai cru comprendre que si Buffalo Runner est un one-shot, il n’est pas impossible que d’autres aventures du même genre voient le jour dans un avenir proche.

Un autre avis : Fab Silver
Buffalo Runner (One shot)
Scénario : Tiburce Oger
Dessin : Tiburce Oger
Édition : Rue de Sèvres 2015
La présentation de l’album sur le site de l’éditeur.

Une réflexion sur “Buffalo Runner

  1. […] en parlent également : Lunch, […]

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